1947 : situation insurrectionnelle dans les arènes d'Arles

Publié le par Charles CREPIN.




 

René CHAVANIEU dit "CHACHA", figure emblématique de l'aficion nîmoise, nous a fourni la photo ci-dessous, assez surprenante représentant les arènes d'Arles dévastées le 4 mai 1947, accompagnée d'un commentaire décrivant les circonstances qui ont amené les aficionados à se transformer en émeutiers et à tout casser ce jour là. Quand on pense que, de nos jours, il n'y a même plus de broncas… 
 



 



M
ai 1947 (…) les arlésiens étaient avides de corridas et (…) la guerre les avait peu favorisés. En 1946, l'amphithéâtre n'avait connu qu'une seule course : une course dite mixte avec José Gonzalez Carnicerito de Mexico, José Pulido Colombiano et José Valle Chato de Movera.
 

La frontière espagnole étant fermée — elle ne rouvrira qu'en février 1948 - organiser des corridas n'était pas, pour Vicente Jorda, chose facile. Le 4 mai 1947, les affiches annoncent cependant une corrida de la ganaderia Yonnet, pour Manuel Martin Vazquez, Benigno Aguado de Castro et Bonifacio Garcia Yoni.
 

Mais la frontière restant résolument fermée, Jorda se fait renvoyer de Madrid par Pedro Recorte le torero mexicain Carlos Vera Canitas, qui arrive en France sans cuadrilla. Vicente Jorda, qui disposait déjà de José Pulido Colombiano, tient les deux tiers de son cartel... Il reste à le compléter avec les subalternes vivant en France, lesquels refusent toute participation à une corrida sans matador espagnol... Le conflit hispano-mexicain est encore présent à toutes les mémoires.

 

Pour l'organisateur Jorda, les choses deviennent compliquées ! On se précipite chez Paco Bernal et Florentino Ballesteros, qui résident en France. Florentino avait fait des études commerciales et possédait le sens des affaires : Jorda a le couteau sous la gorge et le torero exige un cachet élevé. Après maintes palabres et l’intervention du Sous-Préfet d'Arles, soucieux de voir un règlement rapide de l'affaire, Ballesteros est inclus au cartel. Mais tout n'était pas réglé pour autant.   

 

Ballesteros avait bien reçu l'alternative à Barcelone, en octobre 1933, des mains de Vincente Barrera. Mais le succès du matador n'étant jamais arrivé, Ballesteros, aragonais né à Saragosse, renonça à l'alternative en 1936 pour redevenir novillero, et même plus tard, simple banderillero.
 

Et Canitas refuse de faire le paseo aux côtés d'un banderillero ! Après de nouvelles palabres, on arrive à un accord : la corrida sera mixte et Ballesteros combattra ses adversaires en fin de spectacle... Jorda retrouve le sourire... Mais peu de temps avant le début de la corrida, Florentino Ballesteros annonce qu'il ne fera pas le paseo. Motif : on l'a averti trop tard qu'il devait toréer et il a trop mangé ! Ce qui laisse rêveur en période de rationnement ! L'autorité se fâche : Ballesteros ira en prison !
 

Dans ['amphithéâtre romain, l'heure fatidique a sonné : le paseo s'ébranle, avec Carlos Vera Canitas et El Colombiano. Derrière eux, deux banderilleros, le français Charles Michelet et Teodoro Ruiz Macareño, ancien torero qui devait trouver une mort tragique dans les corrales des arènes de Nîmes, le 4 juillet 1954. Mais de picador ? point ! Le président ? Absent !
 

 Le ton monte, les cris de " Remboursez " fusent. En quelques minutes, l'incident se change en insurrection et les aficionados en émeutiers. Les planches et les bancs volent. Au centre de la piste, on a entassé des matériaux divers et on prépare l'autodafé... La police devra intervenir et la course sera annulée...

 

René CHAVANIEU

Publié dans Histoire

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