Une étoile filante...
Mille neuf cent soixante et quelque...Novillada en nocturne à Lunel. Une déjà vedette au cartel : Victor Mendez. Son apoderado-mozo de espada, Gonzalito, a amené un colombien - ou un vénézuélien?- parfait inconnu pour compléter l'affiche...
20 h Hôtel de la Gare. La vedette s'habille, un costume " étrange " orange et noir, hérité de Curro Romero dont Gonzalito est le mozo de espada attitré. Une foule d'amis, de curieux, encombrent la chambre. Notre sud américain que nous appellerons Miguel, lui, est seul avec un costume cent fois loué, les machos repeints à la bombe " or ". Je suis là, désemparé, mal à l'aise, dans cette chambre trop grande, trop impersonnelle, dans la chaleur moite de juillet. Miguel me dit, tandis que je l'habille tant bien que mal " je vais tuer pour mon père qui est au ciel et pour toi qui veux bien m'aider..."
22 h La vedette a déjà coupé une oreille. Manifestement, dés les premiers capotazos, Miguel ne sait rien des toros. En danger permanent. Je casse ma montre sur le burladero en tapant dessus pour "quiter" le toro lors d'une pose de banderilles suicidaire.
23h30. La vedette a triomphé ; nous serons invités a manger une paella à minuit : prévue pour 20 personnes, nous partagerons finalement le plat à 50 !
Je déshabille Miguel, le costume ne sera pas reloué, il est déchiré en de multiples endroits. Après la douche Miguel enfile ses habits civils : baskets usées, jeans idem, polo publicitaire "texaco" et ...blazer trop grand (volé au Corte Ingles). Gonzalito le paie cent mille francs (anciens!). Je lui traduis en Pesetas. Je n'oublierai pas son regard triste et résigné...
Minuit. Je raccompagne Miguel à la sortie de Lunel. Il repart à Madrid en stop.
Je ne l'ai jamais revu.