Aficion militante
Cet édito est parfois écrit sur un ring. Les directs, uppercuts et crochets y pleuvent donc fréquemment. Ce matin, sous le titre « LA MILITANCE », c’était au tour de l’aficion d’encaisser. Problème : le boxeur chausse les gants de l’Observatoire National des Cultures Taurines (ONCT). Faut-il en retour taper sur l’ONCT ? Sans doute non. Esquiver ou jeter l’éponge ? L’aficion n’est pas l’adversaire de l’ONCT, non plus sa concurrente. Pour autant, elle aimerait ne pas être sa cible par personne interposée.
Voyons le corps du délit : « les aficionados ne militent pas, ne protestent pas, ne s'insurgent pas, ou s'ils le font c'est pour se disputer entre eux » (sic). La preuve : seule une « infime minorité » d’entre eux signe les appels de l’ONCT ou lui manifeste son soutien dans ses actions. Exemple : les appels relatifs à l’inscription de la tauromachie au patrimoine français, le droit des mineurs à voir les corridas, l’ILP catalane, Quito, etc. Toutes questions d’importance dans lesquelles l’ONCT a joué un rôle essentiel. Pas très gentil, tout ça...
Sauf que l’avenir de la corrida n’est pas pour autant réglé par ces avancées. Sauf, surtout, que l’aficion a un rôle déterminant à jouer dans la défense de la Fiesta Brava. Mille éditos en ligne sur le web ou dix mille photos prises depuis le callejón, ne sont que d’agréables artifices pour initiés survivants nostalgiques, tandis qu’avance sans faiblir le char du G10 qui fait triompher une corrida que le soussigné en question juge lui-même dévalorisée dans son édito. Est-ce cette corrida qui est préservée par l’inscription au patrimoine de la France ? Est-ce celle-là que nous voulons transmettre à nos enfants ?
Depuis 150 ans, la défense des valeurs de la corrida s’est jouée sur les gradins grâce à la force de l’aficion, sa cohésion et sa capacité à s’opposer aux dérives de toutes sortes. Quand récemment l’aficion s’est indignée de l'outrage fait à un président de course et qu’elle a pris position sur les gradins pour le crier haut et fort, elle était dans son rôle et faisait œuvre utile pour la sauvegarde de ces valeurs avec davantage d'efficacité que toutes les chroniques du moment. Quand des clubs taurins font 500 km pour aller animer des ateliers afin de permettre à de jeunes pousses de découvrir la tauromachie, ses règles et ses instruments, l'aficion est là encore sur son terrain de prédilection et joue son son meilleur rôle.
Alors, on ne peut que noter avec satisfaction les avancées solitaires de l’ONCT et ses triomphes obtenus sur des lignes de crête contre les ennemis de la corrida. Quant à l’aficion, elle doit se charger de ses « amis » dans des combats plus modestes gagnés en bas, sur les gradins. Et si, au lieu de lui taper dessus on pouvait l’aider...