Et pourtant, des toros, il y en a !
Par Paul Bosc
Les images qui nous arrivent de la feria de Séville sont terribles. A chaque jour, l’aficionado subit sa peine de voir des élevages illustres se trainer sur le sable ocre de la Maestranza. Qu’ils se nomment Fuente Ymbro, Victorino Martin, Ventorrillo, Daniel Ruiz, Victoriano del Rio ou Garcigrande et même Cuadri, rien ne va plus au royaume de la fiesta nacional et du toro brave.
Pourtant, après un voyage dans diverses ganaderias de Castille y Leon, dans la région de Salamanca puis en Extramadure nous en avons vu des toros. Et des beaux ! A commencer par Los Bayones où Cantino, le toro indulté par Antonio FERRERA en 2008 à Châteaurenard sème sa graine. Ou bien dans la seule ganaderia gérée par une municipalité, la ganaderia Rollanejo d’encaste Raboso Aldeanueva à Cubo de don Sancho ou encore la ganaderia Salayero Monje à Castillejo de Martin Viejo. Et ensuite en Extramadure pour visiter la ganaderia Guadalest et celle de San Martin y Hernandez Pla et enfin dans une des plus modernes ganaderias à Oliva de Plasensia chez Antonio Lopez Cibaja. Notamment chez Los Bayones, un berrendo terrifiant qui avait l’oeil sur tous les déplacements du cheval du mayoral mais aussi sur le tracteur qui nous emmenait dans le campo. Ce tío n’hésitait pas à montrer son autorité, sa supériorité et sa férocité.
Photo André COSTE
Notre réflexion a été commune : qui voudra d’une bête comme celle là ? Quel veedor acceptera d’embarquer ce genre de toro ? Quel torero actuel acceptera de le toréer ? Certes Los Bayones, ce n’est pas du sang Domecq, mais Lisardo Sanchez. Pas plus que Hernandez Pla, de lignée Santa Coloma mais Guadalest s’approche de la grande famille Domecq comme Salayero Monje et la toute récente ganaderia d’Antonio Lopez Cibaja créée en 2000 sur une propriété ultra moderne où tout a été pensé et réfléchi pour le meilleur rendement des travailleurs et bien évidemment des vaches et des toros, et qui s’orientent vers l’élevage dominant de la tentaculaire famille andalouse. Mais ces ganaderias ne parviennent pas à vendre leurs bêtes qui terminent souvent leurs vies dans le dédale des rues des pueblos. Ceux-là sont âgés, ont des cornes en pointe, pèsent lourds et sont dangereux. La jeunesse de Coria les affronte pour la San Juan comme dans d’autres villes et villages d’Espagne. Pas les toreros. Ce qui est quand même leur métier !
Certes ces quelques élevages ne sont qu’un brin de paille, une chiure de mouche, un grain de sable dans l’immensité des ganaderias espagnoles mais on aimerait tant que les directeurs d’arènes aillent voir dans ces petites ganaderias perdues dans le campo de Castille ou d’Extramadure, parmi les chênes, ces toros de combat authentiques et proposent autre chose que les sempiternels élevages pour vedettes. Pour que la corrida redevienne ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être : un combat.