TORÉONS SOUS LA PLUIE...
Si à Nîmes, quand Ferdinand Aymé gérait les arènes, il était de tradition de dire : « aujourd’hui, il ne pleuvra pas, il y a une corrida aux arènes ». A Saint-Martin de Crau, c’est plutôt l’inverse qui s’est souvent produit. Et, quand ce n’était pas la pluie, c’était le vent, ou la tempête ! Cette année encore, la corrida de competencia de ganaderias françaises a dû être annulée, la corrida de Dolorès Aguirre reportée au 1er mai.
Pourtant, les courses qui se sont déroulées sous l’orage ont souvent pris une dimension exceptionnelle par leur dramaturgie. Trois corridas parmi, sans doute, beaucoup d’autres nous reviennent en mémoire : celle du 23 avril 2000 dans les arènes d’Arles ; celle du 25 mai 2001 à Nîmes et la corrida de Miura à Arles le 25 avril 2011. Trois exemples remarquables par leur intensité alors que le ciel se déchire d’éclairs, que la pluie dégringole par seaux entiers et que le tonnerre gronde méchamment. Bien évidemment d’autres courses ont eu lieu sous la pluie comme celle récente de la feria d’Arles avec les toros de Victorino Martin et le mano a mano tant attendu entre Javier Castaño et Fernando Robleño qui n’a pas transcendé les spectateurs.
A Arles pour la feria 2000, c’est Juan José Padilla qui ira se planter face au toril pour recevoir le Partido de Resina dès sa sortie alors que l’orage éclate mais ne fera pas renoncer celui qui ne s’appelait pas encore le « Pirate ». Une faena fantastique prolongée par une présidence qui allongera les minutes pour ne pas sonner les avis en temps et heure. Le torero de Jerez coupera deux oreilles dans une ambiance mémorable.
Autre souvenir. A Nîmes cette fois, le 25 mai 2001, pour le jeudi de l’Ascension lors d’un fameux mano a mano Jesulin de Ubrique-El Juli. Au cinquième Torrealta, le ciel s’ouvre, Jesulin est au milieu du marécage et patauge mais ne renonce pas. Il écarte le rideau de pluie, s’entête, torée et même si parmi les 16000 spectateurs, certains ont cherché refuge sous les arches, une clameur monte : « to ré roi - to ré roi » pour rendre hommage à ce nouveau Boudu, sauvé des eaux. Deux oreilles qui effacent les sifflets du début de la course. Sur les gradins, c’est la fuite vers les sorties, pensant que la corrida est finie. Il pleuvait toujours aussi fort. Et tout le monde s'attendait à voir s'éteindre la corrida au bout de cinq toros et quatre oreilles. Juli s'est déchaussé à son tour, il a demandé l'ouverture de la porte du toril. Le petit El Juli est assoiffé de triomphe. Torero géant. Torero fou, banderillant puis liant les séries des deux mains près du centre, avalant la noblesse infinie du Torrealta couleur de terre. Deux oreilles et la queue! Historique.
En recherchant dans les archives, une autre corrida tout aussi mémorable hantait ma mémoire toujours à Arles, peut-être en 1992 ou 1993 avec Cesar Rincon et Espartaco. Mais Internet n’a pas retenu cette course. Aussi nous faisons un saut dans le temps pour nous retrouver dans l’amphithéâtre arlésien. Le lundi 25 avril 2011, pour la feria de Pâques. C’est au sixième Miura que l’orage éclate. Medhi Savalli arrachera une faena épique encouragé par tout le public mais il échouera avec les fers. Il gagnera les trophées quelques semaines après, à un Miura, mais c’était alors pour la feria nîmoise.